Les données comme récit : l’essor du récit de données dans le journalisme local

Le data‑storytelling s’impose dans les rédactions locales, non comme gadget, mais comme levier d’explication. Les bases publiques, jadis opaques, deviennent des mines narratives: budgets municipaux, qualité de l’air, logements vacants, déserts médicaux. L’histoire naît quand un chiffre rencontre une vie: derrière une moyenne, on raconte l’écart, l’injustice, l’innovation. Les rédactions qui réussissent commencent petit: un jeu de données propre, une question claire, une visualisation utile, puis un retour terrain pour valider les hypothèses.

La méthode mêle rigueur statistique et sens du lecteur. On nettoie, on documente, on versionne les données; on évite les indicateurs exotiques au profit de métriques compréhensibles. La carte n’est pas l’histoire: elle doit répondre à une question précise, permettre la comparaison, offrir un mode d’emploi. Les marges d’erreur et les limites d’échantillon sont explicitées. Un tableau bien pensé vaut mieux qu’une animation tape‑à‑l’œil; l’accessibilité prime, avec alternatives textuelles et contrastes soignés.

Le terrain reste central. Les données signalent où regarder, pas ce qu’il faut conclure. On confronte les tendances à des témoignages, on photographie les lieux, on vérifie les adresses. Un bon papier data contient des humains, des lieux, des heures; il ne s’arrête pas au repérage des “points chauds”. L’impact se mesure aussi: services ouverts après publication, corrections d’erreurs administratives, débats municipaux déclenchés. Ce sont des preuves d’utilité publique, précieuses pour la confiance locale.

Éditorialement, la sobriété gagne. On structure par questions: que montre la donnée? pourquoi maintenant? que change‑t‑elle pour moi, ici? On publie les jeux de données et la méthodologie pour audit, on accepte d’être corrigé. Les compétences se diffusent: un reporter apprend à faire une jointure simple, un dev apprend à écrire un chapeau clair. À l’échelle locale, le data‑storytelling ne remplace pas le reportage: il l’augmente. Il donne aux citoyens des outils pour comprendre leur quotidien, et aux journalistes des pistes solides pour raconter mieux.

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